•     J'ai mal. J'ai horriblement mal. Mais est-ce ma poitrine qui me fait souffrir ou mes muscles endoloris ? Je ne saurai le savoir. Je ne sais pas où je suis. Je reconnais ces murs dans lesquelles nous avons passé tant de moments qui seront à jamais gravé dans mon coeur. De toi, il ne reste que ce squelette rongé par les vers, ces vêtements déchirés et tachés d'un sang qui ne m'était que trop précieux. Je suis vivante, tu ne l'es plus.

        Je suis perdue.

        Dors-tu ? Tu avais l'habitude de poser ton haut-de-forme sur tes yeux. "Pour te cacher de la réalité", tu disais. Attends-moi, juste quelques secondes, le temps que j'aille te le chercher. Car tu as raison de te cacher, de te cacher de ce monde injuste. Il te sied à merveille. Quand tu te réveilleras, je te ferai un ragoût. Celui que tu appréciais tant déguster. "Car c'est toi qui me l'a cuisiné" tu répétais. Oh, mais j'oubliais, tu risques de prendre froid en étant allongé sur la parquet, je vais te chercher une couverture. Elle a été un peu déchirée, mais ce n'est pas bien grave, je ne l'utilise pas.

        Tu finiras par te réveiller n'est-ce pas ?

        Tout reprendra son cours, nous vivrons heureux, deviendrons parents, puis grand-parents. Nous verrons nos enfants grandir, chaque jour sera aussi précieux. Comme cette peinture. Ton oeuvre la plus précieuse, sur laquelle tu nous avais représenté, le visage souriant, dans ce champs de fleurs sauvages. A nos côtés se tenait deux petits enfants : un garçon à la crinière indomptable de couleur vin et une fille, certainement moins âgée, aux couettes sombres. Nous ressemblerons à cela n'est-ce pas ? Je serai heureuse de porter tes enfants. Je serai heureuse de les élever, de grandir avec eux, de passer chaque jour dans la joie, de les voir s'épanouir. Tu seras avec moi, me souriant tendrement, me glissant quelques mots doux.

        Oui, notre avenir sera ainsi. Il n'y a pas d'autres solutions. 

        S'il-te-plaît, réveille-toi.

        Ouvre les yeux, regarde-moi. Regarde-moi de tes yeux cristallins, montre-moi encore ce sourire tendre. Laisse-moi t'embrasser encore une fois. La chaleur de tes lèvres, leur douceur infinie. Laisse-moi profiter ne serait-ce encore une fois de tout cela. N'étions-nous pas destinés à être heureux ?

        Non, le destin en a voulu autrement.

        Tout est encore de ma faute. Si je ne m'étais pas tant éloigné de sa majesté la reine, rien de tout cela ne serait arrivé. Tu ne serais pas là, immobile. Tu me regarderais encore, m'embrasserais et me susurrerais des mots tendres au creux de l'oreille. Tu rendrais cette peinture réelle. Tu en ferais notre nouvelle réalité.

        Cobalt.


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